Accident au travail : condamnation d’un gestionnaire de projet à 3½ ans en prison
Le 11 janvier 2016, un tribunal de l’Ontario a imposé la peine la plus sévère pour le rôle d’une personne dans un accident au travail. Un gestionnaire de projet a été condamné à une peine d’incarcération de trois ans et demi pour son rôle dans quatre accidents mortels survenus au travail le 24 décembre 2009. Ce jour-là, six employés réparaient des balcons au treizième étage d’un immeuble d’habitation lors de l’effondrement de l’échafaudage volant sur lequel ils travaillaient. Les quatre employés décédés n’étaient pas munis de harnais de sécurité. La Cour supérieure de l’Ontario, dans R. c. Vadim Kazenelson, 2015 ONSC 3639, a déclaré le gestionnaire de projet coupable de quatre chefs d’accusation de négligence criminelle causant la mort et d’un chef d’accusation de négligence criminelle causant des lésions corporelles. À la suite du jugement, le gestionnaire de projet a été condamné à une peine d’incarcération de trois ans et demie, résultat qui fait l’objet d’un appel. Dans la détermination de cette sentence, le juge s’est fondé sur les faits ci-après concernant le rôle du gestionnaire de projet dans l’accident :
- le gestionnaire de projet était pleinement conscient que chaque travailleur devait être solidement accroché à un harnais;
- le gestionnaire de projet était ultimement responsable de la sécurité des travailleurs le jour de l’accident;
- le gestionnaire de projet avait utilisé l’échafaudage volant et savait que les travailleurs ne disposaient que de deux cordages de sécurité;
- la preuve a révélé que le gestionnaire de projet avait exprimé verbalement des préoccupations à l’égard du manque de cordages de sécurité, mais il n’a pourtant pris aucune mesure visant à corriger ce manquement aux exigences de sécurité.
Le juge a conclu qu’il s’agissait d’un cas dans lequel le gestionnaire de projet « [Traduction]a appréhendé le risque mais a décidé qu’il était dans l’intérêt de [l’entreprise] de prendre une chance ». Cette situation a été considérée représenter un facteur aggravant en lien avec le blâme moral du gestionnaire de projet. Le juge a aussi pris en considération la gravité de l’infraction et le degré de responsabilité du gestionnaire de projet pour conclure qu’une peine d’incarcération importante était indiquée.
Les accusations criminelles, quoique rares, sont une réalité
Les employeurs peuvent être tenus criminellement responsables de manquements en matière de santé et de sécurité. En 2004, le Code criminel a été modifié par l’ajout de nouvelles infractions criminelles qui font en sorte que des organisations, y compris des sociétés, leurs agents et quiconque supervise le travail d’autrui, puissent être tenues criminellement responsables des lésions corporelles ou des accidents mortels travail causés par la négligence (article 217.1 du Code criminel).
Ces dispositions du Code criminel ont une incidence sur l’ensemble des organisations et des personnes qui supervisent le travail d’autrui, partout au Canada. Ces organisations comprennent les gouvernements fédéral, provinciaux et municipaux, les sociétés, les entreprises privées, les organismes de bienfaisance et les organismes non gouvernementaux.
Les exigences en matière de santé et de sécurité au travail
En plus de la responsabilité pénale, tous les employeurs sont soumis à la législation en matière de santé et de sécurité au travail. En vertu de la législation en matière de santé et de sécurité au travail, les employeurs sont tenus, entre autres obligations, de prendre toutes les mesures voulues pour assurer la santé et la sécurité de l’employé. Les exigences en matière de santé et de sécurité diffèrent selon la province de l’employeur, son assujettissement au régime fédéral, le type de travail accompli par les employés et le nombre d’employés. L’employeur qui ne remplit pas les obligations que lui impose la législation en matière de santé et de sécurité au travail est coupable d’une infraction et peut se voir imposer une lourde amende ou une peine d’incarcération.
Limitation de la responsabilité potentielle
Les employeurs peuvent limiter leur responsabilité et réduire leur risque d’accusation en vertu du Code criminel ou de la législation en matière de santé et de sécurité au travail, en mettant en place un programme efficace lié à la santé et à la sécurité au travail.
En tant qu’employeur, vous devriez, à la fois :
- vous familiariser avec les obligations en matière de santé et de sécurité au travail qui vous incombent;
- connaître les risques présents dans votre milieu de travail;
- élaborer un plan visant leur réduction ou leur élimination.
Les employeurs devraient également veiller à ce que les employés connaissent les programmes de santé et de sécurité au travail de l’entreprise, qu’ils soient informés des risques présents en milieu de travail et qu’ils reçoivent une formation et un matériel de sûreté adéquats. En faisant preuve de diligence face aux exigences en matière de santé et de sécurité au travail, les employeurs se protègent eux-mêmes et protègent aussi leurs employés.